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Compte-rendu de la journée du 15 mars 2003
HISTOIRES DE VIE ET VOYAGE.
Participants : Dominghos Penha ; Claude Cazenabe ; Martine Lani-Bayle
; Joëlle Bolle ; Fatiha Kémat ; Marie.José Guillin
Monganne ; Patrice Audurier ; Nadia Bire ; Avelino Ferrera ; Sandra
Vasconcelos ; Luciane de Conti ; Karine Le Duc ; Natacha Lamblin
; Edith Chabot ; Maryline Rigaudière ; Sylviane de la Rochebrochard
; Christine Leroq Sureau ; Le Duc Kaire ; Francine Sebilo ; Philippe
Bagros ; Christophe Niewiadomski ; Christine Abels ; Nicole Croyère
; Gaston Pineau ; Muriel Molinié.
Muriel Molinié
Discontinuité, cohérence et congruence biographique
du voyage
L’étude porte sur un groupe de 7 jeunes nord –américains
en stage de formation de 10 semaines dans un village vendéen.
Le récit est utilisé au fur et à mesure de
son écriture, pendant le voyage. Il sert la transformation
ontologique du voyageur. Celui-ci utilise ses écrits comme
une part de lui-même avec laquelle il dialogue en présence
d’un tiers qui se comporte selon les règles de l’accompagnement.
Le but est de travailler sur la transformation induite par le séjour
et de trouver des issues quand il y a difficulté.
Deux de ces jeunes offrent des parcours exemplaires :
Allen vit son séjour comme une traduction de sa personnalité
dans une autre langue et un autre milieu. Il souffre de l’insuffisance
de ses moyens linguistiques, et de l’étrangeté
du milieu villageois français. En dialoguant avec M. Molinié
à propos de son journal il trouve une issue dans une enquête
faite auprès des villageois sur leur alimentation. Dès
lors ce n’est plus une traduction de sa personnalité
préexistante, mais une immersion fécondante dans la
culture.
L’évolution se poursuit après son retour en
Amérique car il revoit son récit en utilisant la métaphore
du Rhinocéros de Ionesco.
Michelle agit différemment : son récit manifeste son
intérêt pour le changement induit en elle même
par le séjour: « Je devient un autre ».
Fatiha Kemat
Du nomadisme individuel ; acte (s) de « résistance
» au service de la quête existentielle et de pratiques
d’auto formation.
J’ai toujours été captivé par le nomadisme,
comme moyen pour aider à la construction de sa vie, c’est
à dire, des séquences de vie faites de micro-ruptures,
la possibilité de jouer avec des ancrages territoriaux différents,
simultanément. Des espaces porteurs de sens, de projets,
de rencontres variées et donc d’espace d’expériences
de soi, des autres et du monde diversifié.
Ceci non pas dans l’esprit d’un butinage compulsif,
mais sous la forme d’un tracé qui cumule cohérence,
construction, mais qui aussi laisse la place au hasard, à
une forme d’aventure qui permet de nouvelles élaborations
en terme d’itinéraire de vie.
En effet, le nomadisme permet entre autre, d’introduire dans
sa vie une forme de liberté créatrice, que Maffesoli
appelle la « duplicité » : « une manière
d’introduire le bougé dans ce qui est stable, ou de
l’inquiétude dans ce qui est par trop assuré
par lui même »
Aussi, le nomadisme ; est une sorte d’intermédiaire,
il permet de bénéficier des dimensions du voyage,
tout en participant à la mise en forme de son histoire de
vie, au travers d’un jeu entre des temps de sédentarité,
d’itinérance, de nomadisme et de mises en errance choisies
par le sujet.
Dans le même ordre d’idée, j’ai pu me
rendre compte qu’il est des parcours de vie ressemblant à
une conduite sur autoroute, balisée, efficace ou cherchant
de l’être.
Il est aussi d’autres itinéraires de vie, pouvant tracer
une carte originale, miroir de la singularité de son auteur,
rejoignant parfois une artère d’autoroute, mais gardant
toujours l’œil rivé sur le petit chemin d’à
coté. Ces derniers peuvent sembler chaotiques, voir dépourvus
de cohérence au regard d’une certaine norme sociale,
institutionnelle et éducative dominante.
Pulsions d’errance, d’itinérance et de nomadisme,
qui étrangement contribueraient à l’élaboration
de véritables parcours d’auto formation.
L’auto formation se définissant ainsi, selon Gaston
Pineau : « Il s’agit d’une formation par soi,
avec soi, de l’appropriation de sa formation de l’être
humain en lutte avec les déterminants sociaux. Elle consiste
à se donner une nouvelle forme et ainsi à reconnaître
qu’aucune forme n’est achevée, n’existe
à priori, et que sa construction est une activité
permanente »
Je fais donc un lien, entre une forme de nomadisme individuel,
engendrant un nomadisme intellectuel, permettant d’accéder
à des processus d’auto formation expérientiels,
existentiels et cognitifs. Ceci contribuant d’une manière
particulière à la construction de l’histoire
de vie de sujets nomades, en étroite corrélation avec
leur propre quête de construction d’eux même.
Ce qui m’intéresse aussi, c’est le fait que
l’étude de cette forme de nomadisme, permette de réhabiliter
des types de parcours de vie, de rapports à l’existence
et au savoir, méconnus et n’ayant pas toute leur légitimité,
ou la gagnant difficilement au sein de nos institutions et des valeurs
de notre société moderne occidentale.
Le nomadisme, tel que je l’ai étudié, en m’appuyant
sur les parcours de vie de trois hommes, m’apparaît
être entre autre une forme de « résistance »,
menée par des individus qui cherchent à créer
leur histoire de vie sur d’autres repères et fondement
qu’une certaine norme sociale dominante et contre une forme
de déterminisme social. Ceci ne les empêchant pas d’être
intégrés socialement et culturellement. Nous trouvons
un début de définition de ce type de trajectoire dans
« L’esprit nomade », de Kenneth With, citant Nietzsche,
Nietzsche qui évoque la « voie hyperboréenne
» pour caractériser les parcours nomadiques : «
Il est des hommes qui ont beaucoup d’accidentel en eux et
se plaisent à vagabonder, d’autres qui ne vont que
par des chemins frayés vers des buts…Les hommes inventifs
vivent tout autrement que les actifs : il leur faut du temps pour
que se déclenche leur activité irrégulière
et sans but, expériences, nouvelles voies, ils tâtonnent
plutôt qu’ils ne se contentent d’emprunter les
chemins frayés comme le font les hommes de l’action
efficace. »
Enfin, bien malgré elle, il apparaît que notre modernité
commence à mettre en lumière ces parcours nomadisants,
des parcours encore difficiles à identifier, mais qui permettent
l’apport d’éclairages pertinents concernant par
exemple, le champ de l’auto formation, l’apprivoisement
de la complexité, les questions identitaires, d’appartenances.
Aveluno Ferrera
Début de thérapie et voyage
On grandit ou on meurt par le regard des autres. Le handicap n’est
que la manière dont les autres nous voient….mais on
dit à l’autre « moi aussi je te regarde ».
Tant qu’on reste dans son milieu, même si on s’efforce
avec vigilance de vivre comme les autres, le statut d’handicapé
recouvre l’identité personnelle. L’image de fragilité
suggère l’immobilisme. Précisément, ce
qu’il faut c’est partir.
Partir loin… ; pour exister il faut insister ! Ce n’est
pas à Paris qu’on apprend la marche au Népal
. Aux Indes, en se débrouillant seul dans la foule, prendre
le bus et défendre sa place. S’apercevoir que le statut
qui domine c’est celui d’ « international ».
Au Cambodge on est un autre personnage. On se fond dans la foule
de ceux qui ont été blessés par les mines,
et qui doivent eux aussi se débrouiller.
Mais le voyage a ses pièges, ceux ou tombent beaucoup d’éternels
voyageurs : l’instabilité, la distraction, qui mettent
la vie entre parenthèses au point qu’on risque de cesser
d’être soi.
Joëlle Bolle
Voyage et immersion culturelle
L’immersion suggère la porosité. Un envahissement
par tous les sens. Quelque chose qui prend du temps et qui change
notre substance intime.
Effectivement il y a en partant pour ces deux voyages longs, 3 mois
puis 6 mois aux Indes, l’acceptation d’aller s’exposer
sans calcul à une autre culture et d’en revenir différente.
Cependant Joëlle Bolle associe toujours (citant Bernard Fernandez)
un autre mot à immersion, avec un tiret : immersion-adaptation,
immersion-compréhension, immersion-intégration ; trois
étapes qui se succèdent lentement. Ceci traduit le
rôle du pragmatisme, et une action résolue, non pour
se défendre, mais pour faire fructifier le voyage.
Avec le présent qui arrive J. Bolle intègre à
la fois du vécu antérieur et des aspirations qui se
révèlent. Rentrant en France elle mesure le changement
survenu en elle à l’effort qu'elle doit faire pour
se réadapter, et continuant le même travail, réfléchit
à ce qui bien avant le voyage l’avait préparé.
Elle l’a en fait dit dès le début : il y a continuation
du sens donné par le passé familial : une famille
bretonne ou on n’apprenait le français qu’à
l’école, écoutait les récits sur les
parents émigrés en Amérique, et rêvait
avec la mère de culture hindoue ; puis un groupe de musiciens
hindous séjournant en France. Une culture ancestrale du départ.
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